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l'oeil & la plume... un autre de ses fils
texte de bruno tomera ill. jlmi
je l’ai rencontré dans un caboulot rue Mercière à Lyon.
Un brasier rouge d’accent du sud,
supporter clodo de l’OM,
on a parlé autour d’un picrate de tout et surtout de rien.
Il était paumé, ça tombait bien, on avait du temps.
On s’est retrouvé à Avignon quand les contrôleurs
nous ont débarqué sur le quai,
même les flics n’ont pas effacé de ses yeux cette petite lueur ravivée.
Lézards sous la chaleur des remparts, on matait les filles
« wahoo t’as vu celle là»
« canon »
« j’te lui en ferais bien péter un coup »
Rien que de l’humain désenchanté
quand tirer une crampe avec d’inaccessibles silhouettes
s’apparente à s’envoyer en l’air avec des cauchemars bien mûris.
On a poussé à dix on ne sait trop comment
sauf que là des romanos nous ont braqué.
Les pauvres volent que les pauvres, c’est plus facile.
Aux coups de poing, ça allait, quand ils ont sorti les surins
je leur ai filé la petite monnaie,
la gueule éclatée, d’autres flics nous ont empaqueté
puis on a débarqué à St Charles sans contrôle.
Le soleil hurlait, la ville aussi, les morts marchaient,
tout fonctionnait.
Ses adresses sont bidons, on a bu fait la manche et rebu,
il s’est mis à trembler, à déconner raide et pis il est tombé en râlant.
Y a fallu du temps avant que les marins pompiers
l’embarquent dans leur sillage dantesque.
M’ont rien demandé, ni son nom que je ne connaissais pas
ni ses vieux rêves déguenillés.
La mer, là-bas il y avait l’Afrique une autre « Mère » qui
se demandait comment elle avait pu engendrer une telle bande
de ridicules anxieux, fabricants de la misère qui se goinfrait
de famines, de sida, de guérillas et de contrées détruites.
Une mère qui n’aurait jamais assez de larmes.
J’ai cru poser un moment ma tête sur l’épaule de la Madone dorée.
Il n’y avait pas de miséricorde,
il n’y avait rien que des corps qui fonçaient droit vers le néant.
Je lui avais ramené un de ses fils.
J’avais pu qu’à aller me faire voir ailleurs.
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