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toile de Linda ZacksTrois lecturess de la même image
Cathy Garcia
Seul, seul dans le bleu ambulance des nuits abimées, seul sur le versant négatif de la réalité, seul et abandonné face à la neige des anciennes télés, seul le petit garçon reclus dans un coin de la mémoire, seul et tranquille, tranquille pour rêver, pour dessiner le cosmos sur sa paume, une paume d'Adam, celui qui n'avait pas maman, seulement un Père qui était aux cieux avant de devenir odieux... à moins que ce ne soit l'inverse...
Isabelle le Gouic
Seul... Il voulait oublier. Ne voulait plus penser. Il ne voulait plus voir. Ne voulait que la nuit. Que la nuit. Que la nuit écouter. Ne plus réfléchir. Ne voulait plus penser. Il ne voulait plus voir. Ne voulait plus voir. Seul. Il voulait oublier. Ne voulait que la nuit. Noire. Noire. Ne plus penser. Ne plus réfléchir.
Seul. Seul. Ouvrit les yeux. Juste un instant. Juste assez pour que le bleu de la réalité lui saute au visage. Bleu, bleu comme celui du miroir où toute son histoire réféchissait.jlmi
J’aime bien les nuits étoilées. C’est très beau... et ça coûte rien. Suffit d’ouvrir les yeux. Alors je suis là, assis à deux pas de la cabane où dorment mes parents et mes six frères et sœurs. On a toujours été là. Faut dire que c’est pratique pour travailler le matin. On est sur place. On perd pas de temps avant que les premiers camions arrivent on a déjà commencé à trier. Après, avec mes copains, on colle aux culs des bennes à la recherche des plus belles trouvailles, peut-être du trésor qui….
Mais là, oui, je suis assis, sur mon tas d’immondices dans une de vos décharges ‘’à ciel ouvert’’ et je regarde les étoiles… et je rêve…votre commentaire
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texte de cathy garcia ill. jlmi sur photo de Kevin Carter
le soleil s’est levé rouge poussière
des enfants secs sont couchés
des vautours les veillent
d’autres sont chiens défoncés
soldats de misère
les vautours s’agitent et un enfant
petite fille peut-être
ne se relèvera pas
les os lui crèvent la peau
un bourdonnement irritant monte en puissance
le son d’une armée de mouches
la vibration de milliers de paroles discours polémiques
projets plans gesticulations économiques
choisis ton pseudo humanitaire
le sujet au fond a peu d’importance
le sujet est une carcasse
que se disputent les éboueurs du désert
négligeable carcasse
sujet vite oublié
pourtant elle a un nom
cette poussière que l’on piétine :
enfants d’Afriqueextrait de Pandémonium II
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texte & ill. André Laude
J'ai partie liée avec les voyous
les brûleurs d'ordures
les chapardeurs de pneus
les ignorants de la dialectique
les fougueux loulous des banlieues
les rebelles des taules
les incendiaires d'asiles
psychiatriques de vieillards
les démolisseurs du verbe
que le SYSTÈME
diffuse sur les écrans planétaires
de la TV
dans les vidéo-cassettes
cachées sous les vêtements
dans les poitrines aliénées
j'ai partie liée avec
l'écume de la rue
les incultes les cerveaux défoncés
les baisés de toutes les races
les portugais de la planète
mentale, psychique, sociale,
les fous de vitesse
les impatients Les fiévreux
ET TOUS CEUX ET TOUTES CELLES
QUI VEULENT FAIRE LE MONDE
DANS LA MERVEILLEUSE ÉVIDENCE DU CORPS
***
un feu me brûle
j'ignore son nom
sur tes lèvres
déchiffrées par doigts d'aveugle
j'ai désiré
silence et paix
un feu me hante
il me courbe me façonne
me fait ange le matin
démon au crépuscule
un feu plus cruel que la mort
pourtant précise dans ma chair
un feu me crée
un feu m'enterre
depuis toujours depuis le plus lointain vagissement
il commande en chef
il ordonne et j'obéis
larve ou prince lauré d'infini
il me dicte le chemin la parole et le sang du moment
il m'épuise et désagrège mes os
il multiplie les abcès
autour de mon cœur organe
tumultueux impossible à tenir en laisse
il me ravage
je l'aime fais l'amour avec lui le hais
il me déchire jusqu'aux souches quaternaires
il m'approfondit m'installe en pleine clarté
m'enfouit dans la ténèbre purulente
il me condamne m'exécute me donne le coup de grâce
il hurle quand il accouche de ma figure humide
un feu me déporte
m'exile aux frontières
m'interdit le corps et l'extase
le chant et l'unité
un feu me traque
quand je dors
quand je caresse la putain
le marin blond suédois de Toulon
quand je tente de pénétrer
par les yeux
la réalité de la chèvre et du chien
quand arc tendu jusqu'à rompre
je m'efforce désespérément de m'éveiller
poireau, chou, carotte, caillou, giroflée, radis
mi-rose mi-noir
un feu aura raison
un feu aura mon sexe
ma chair morte depuis longtemps
mes jambes de fuite Mes hanches de vertige
un feu qui ne se nomme pas
dans toutes les langues connues de la planète
y compris celles à venir
et que nous ignorons encore
André Laude /Testament de Ravachol - Corps interdit - Éditions Plasma - 1975 (extrait)
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