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texte Jean-Louis Millet sculpture Shunjōbō Chōgen, ca. 1206
Un vieux sage japonais stupide et mélancolique,
désemparé d’avoir jeté son eau par la fenêtre
et brisé sa main sous la théière de fonte noire,
décida soudain d’écrire sa vie sur une goutte de pluie.
Ainsi commença-t-il :
« La fée des neiges de la solitude
n’a jamais vu la mer
dans le petit lit de l’horizon.
Le murmure éternel du Silence Immuable
n’en finit pas d’emplir la fulgurance du vide obscur
de gigantesques colonnes d’une brume gluante et verdâtre
soutenant le toit du monde.
Ce soir, goût amer dans la bouche.
Pas une parole n’a passé mes lèvres depuis des jours.
" Des fleurs meurent chaque jour
mais où part leur parfum ? "
me disait le koan.
" Le péché le plus grave est d’avoir raison. "
répondait encore mon cerveau hirsute et chaotique
dont l’odeur de vacarme attirait les fougères visqueuses
d’une guerre commencée depuis des milliards d’années.
Les soleils amers des eaux du souvenir
tentaient de passer
sous les ponts de gravats putrides
déposés là par l’effondrement d’une congrégation pitoyable
devenu sénile et sépulcrale
dans l’agonie de rocailles terrifiées
des ombres bleues du désir.
Des essaims de chevaux lunaires
tiraient le long fardeau brûlant
de poussières en suspension
de mes os desséchés sur la sélène.
De ces attelages naissaient des atomes d’imaginaire
émetteurs de lumière au sein de l’ondité
de l’univers creusée par les étoiles
tombées en larmes de soleil.
Dans les phrases de la fin de l’aube
montaient des murailles de mouches
au linceul millénaire de la mer lugubre.
Un suaire de nuages
horreur du moment de ce monde
recouvrait tout du silence de diamant
de l’ellipse des éclipses de l’apocalypse.
Au sensuel de la ville d’en bas,
l’arc d’un parc marquait la voie
du déshonneur des honneurs oniriques.
Un pâle soleil vernissait un lac
au visage de rêves fantomatiques
avec autour des yeux les cernes mauves du plaisir
d’un shogoun shintô en sfumato de shantoung
mangeur de nuages et buveur de vent .
Nulle aventure ne dure... »
Il poursuivit longtemps de la sorte
Jusqu’à ce terme :
« ... un dernier rire sur des lèvres mortes
comme perles de sperme au sein du vide impassible
" Sauver un grain de sable ?
Tout est bien, les chats dorment ! ". »
Il vit alors que la surface de la goutte d’eau était encore intacte,
comme si rien, jamais, n’y était apparu.
C’est alors qu’il comprit de toute évidence
qu’elle était une perle de la rosée
d’une femme amoureuse d’une vulve chauve.
Le désir passe fort
avant qu’au creux des corps
d’autres pages ne s’écrivent.
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texte & image Jetsün Milarepa
maître tibétain et poète (1040 - 1123)
Dans les grands déserts, les hautes montagnes,
il existe un négoce étrange
on peut troquer le tourbillon de la vie
contre l'infinie paix de l’âme
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Vous aimez aujourd'hui le lacis des maisons
Qui s'accrochent en dessous des châteaux.
Mais souvenez-vous qu'à la mort
Vous partirez par une route désolée.
Vous aimez aujourd'hui sur vos épaules
L'amoncellement des honneurs.
Mais souvenez-vous qu'à la mort
vous partirez sans protection ni refuge.
Vous aimez aujourd'hui la profusion
Des liens de famille et de voisinage.
Mais souvenez-vous qu'à la mort
vous vous séparerez des parents, des amis.
Vous aimez aujourd'hui accumuler
Richesses, fils, assistants, serviteurs.
Mais souvenez-vous qu'à la mort
Vous partirez nu, les mains vides, démuni.in les cent mille chants
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texte & collage Cathy Garcia Canélès
Masque sur masque,
à ôter
jusqu’au plus transparent.
Poids après poids,
à déposer...
Tu connais la musique et
tu continues à marcher,
tu continues à chercher
jusqu’à t’élever,
souveraine.
Pierre, sable et ciel,
sublimation de la fêlure.
2024
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