• l'oeil & la plume... l’homme fou rêve du blanc

    l'oeil & la plume... l’homme fou rêve du blanc

    texte arthur fousse                  ill. jlmi Sous les Nuages / Retour des Hirondelles

      

    malade,

    fou,

    je regardais

    les murs,

      

    il y avait

    bien peu

    de choses

    dans ma vie. 

     

    et dans

    cette folie

    étrange

    où je ne pouvais

    plus boire

    sans que la chair

    se dissolve

    et hurle à sang,

    je restais là

    et regardais

    les murs blancs,

    ces inentamables

    murs blancs qui

    duraient

    et drainaient

    tout. 

     

    le blanc

    semblait

    changer,

    bouger, 

     

    et dans mon délire,

    je voyais

    les rainures

    du radiateur

    coulisser

    comme des pistons

    comme des pythons

    et enlacer les pleins

    et les vides,

    et faire le tour

    du radiateur.

     

    l’asile 

    était toujours fermé.

    je restais là

    et dehors,

    la neige tombait.

     

    la mue d’un sommeil

    éternel tombait,

    le duvet céleste tombait,

    et ces petites gouttes

    de ciel cotonneux

    et de nuage

    fané

    dansaient

    dans le vide

    de l’air.

     

    je pensais

    à d’étranges indolences,

    je ne comprenais rien,

      

    je…sentais…un tel vide prégnant

    qu’il avait pris la place du monde,

    et à peine si j’éprouvais

    à quel point le monde était consistant

    tout comme la réalité.

     

    mais je regardais

    cette neige tomber,

    incessante,

     

    je la regardais

    et c’était calme ; 

     

    c’était comme regarder sa vie de

    l’autre côté de la mort

    dans un repos infirme,

    dans un mutisme profond

    duquel les lèvres du jour

    ne s’ouvriraient jamais.

     

    je me taisais

    et je prenais les médicaments,

     

    et un jour un type  a dit, 

    cette neige

    de quoi est-elle l’usure ? 

     

    je n’en savais rien ;

      

    mais le ciel

    s’émiettait

     

    et dans ce sablier

    éternel et blanc

    sans retour

    nous nous taisions.

    le blanc des murs

    était toute

    notre existence,

     

    nous étions

    une faillite.

     

    mais dans ce silence

    étrange 

     

    nous nous taisions

    et pensions à nos vies

    que la neige

    rendait plus lointaines

    que tout

    et plus belles que jamais,

    là dans l’infirmité de notre présent

    et l’éternité de tout ce blanc

    qui tombe

    et tuait tout.

     

    paru dans Traction Brabant n°83

     

     


  • Commentaires

    1
    Cathy
    Vendredi 4 Septembre 2020 à 19:59

    magnifique, j'ai pas encore lu ce numéro sans quoi je m'en souviendrais !

     

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