• l'oeil & la plume...

    texte Hervé Le Tellier  aka Teishi Hiro                                               ill. jlmi 2023

     

    Elles taisent le monde

    Pressées sur mes oreilles

    Ses cuisses

     

     

     


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  • texte & photo Anna Akhmatova

     

    De toutes façons tu viendras — pourquoi pas maintenant ?

    Je t’attends — vivre est trop dur.

    J’ai éteint la lampe, ouvert tout grand la porte

    Pour toi, si simple et merveilleuse.

    Prends la forme que tu voudras,

    Engouffre-toi, projectile empoisonné,

    Faufile-toi avec ta pierre, ta chaîne, comme un bandit,

    Ou tue-moi d’une fièvre typhoïde,

    Ou d’une fable de ton invention

    Mille fois rabâchée, —

    Que mon regard aille au-delà de la casquette bleue

    Et du concierge blême de terreur.

    Maintenant tout m’est égal. Le Ienisseï tourbillonne,

    L’étoile polaire brille.

    Et l’éclat marine des yeux que j’aime

    Couvre la dernière épouvante.

     

                             19 août 1939. Maison de la Fontanka

    Anna Akhmatova / Requiem (extrait)
    Traduit du russe par Marion Graf et José-Flore Tappy

     

     


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  • texte & ill. Serge Wellens  (par jlmi  2023)

     

     

    J’habiterai

    cette lumière d’après la pluie

    qui souffle sur la braise

    des coquelicots dans les blés

    qui fait chanter les arbres

    et courir de joie

    les poules d’eau sur la rivière.

    Le vent conduira

    l’ombre de ma main.

    J’écrirai sur le sable

    un poème sans fin

    pour célébrer la vie.

     


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    l'oeil & la plume...  à l'instant fulgurant

    texte de Annelyse Simao                                                                ill. jlmi  2004

     

     

    A l’instant fulgurant du jouir  se quitter sans songer
    à nos corps Nous parcourir  Revenir à l’étreinte au jet
    dans la suite la question du oui accompagne en continu

    A-t-elle un sens seulement pour elle
    dans la bouche conquise  où l’obsède
    cette pulpe ouverte sans que puisse jamais lui parvenir
    de certitude complète

    Il plonge en moi couchée Suis-je sous lui  au-dessus
    Lequel attire quel conquiert
    Qui des deux prend  qui des deux cède
    sinon l’une après l’autre
             sa lèvre et la mienne

    *

    Avant que son sperme ne commence à glisser  où m’ouvrir
    et m’investir je t’ai hissé d’avance du néant
    T’égrène par syllabes en prénoms  te cherche une danse
    forme ébauchée de ce qui vient

    Sens ce toucher d’un manque  il me court sous la peau
    Sors du rêve de plénitude  creusé par ton fardeau
    Vide au ventre Lancé dans mon corps par des songes
    sous leurs figures absentes je plonge
    où te pétrir une vie  risque un élan et la mort
    entre auparavant et désormais

    Dans un visage sonore pressenti distinct
    nous t’aurons choisi(e)  Jailli de notre ensemble
    grâce au geste tant de fois recueilli dedans nos voix
             mon cœur se déchirera ton appel

     

    Extraits de Dans un corps éloigné de mémoire, in Qu’il m’en reste partout, La Dragonne, 2005

     

     


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    l'oeil & la plume... et dans le ventre cette braise

    texte de murièle modély                                                                 ill. jlmi 2020

     

     

    et dans le ventre cette braise qui n'a plus rien d'ardente

    trop de cendres, les jours ont consumé

    ont laissé leur suie grasse jusqu'à l'anus

    une bavure que je regarde droit
    dans les yeux

    dans les gogues

    "vas-y, baisse, remonte ta culotte

    vas-y, respire, halète"

    dit l'angoisse, ce poids mort qui pèse

    alors je mets du rouge sur mes lèvres

    du noir sur mes yeux

    et je souris à des inconnus

    surtout les tristes
    les seuls dans les bus

    qui n'ont même pas un téléphone pour un peu de lumière bleue

    je m'assois face à ceux qui n'ont rien

    dans les mains

    dans les yeux

    et j'espère que ma mâchoire sera assez grande pour deux

    pour moi
    pour eux

    je me dis qu'il doit y avoir de la beauté

    sous nos odeurs de merde

    sous nos petites suées

    sous nos petites pensées

    dans nos petites vies

    il y a de la beauté 
    quelque part qui apaise

    en attendant je mets du rouge, du noir, j'avale
    pourvu qu'à l'intérieur mon charbon ne cesse de pulser

     

     


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