• Expo à la Souris Verte à Cajarc (46)

    6 octobre au 8 novembre 2023

     

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    Au bistrot littéraire La Souris verte, Place de l’Église à Cajarc, du 6 octobre au 8 novembre, un pot (très) convivial sera offert le samedi 7 octobre à 18 h.

     

     


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  • parution ...  revue Nouveaux Délits n°76

     

    Nous venons de passer le mois dit de la rentrée : bonne rentrée ! souhaite-t-on… Et la sortie, bonne sortie ? Nous usons au sens littéral de formules, elles finissent par être très polies mais que signifient-elles vraiment ? Formule, c’est joli ce mot si on n’y colle pas de chiffre après, genre formule 1 ou l’air renfermé d’un formulaire…

     

    Et si nous profitions de la rentrée donc pour rentrer oui, véritablement, en nous-mêmes ? C’est ce que nous enseignent les cycles des végétaux qui en cette saison — de notre côté du monde en tout cas —, après avoir tout donné pour se perpétuer, laissent tomber leurs derniers fruits, dernières graines sur le sol où chacun sait ce qu’il à faire puis ralentissent le rythme, laissent redescendre la sève aux racines… Les animaux se préparent aussi pour la saison froide donc ce serait bien le moment de rentrer en soi, voir la rentrée comme un ralentissement, un approfondissement plus qu’une agitation, une accélération…

     

     

     

    On l’oublie trop souvent : la majeure partie de ce qui se passe dans le monde, se passe d’abord en chacun de nous et on revient à la formule — abracadabra, que le feu de Dieu tombe sur toi ! — et quelle autre déité ici-bas que nous-même, qui décidons et créons, éludons ou provoquons, prévenons ou aggravons ? Sommes-nous déité de la discorde ou des récoltes ? De l’argent ou du soin ? De l’avidité ou du partage ? Ladite nature est imprévisible, oui, mais nous sommes une espèce dite intelligente et nous pouvons concevoir l’imprévisible et protéger l’essentiel. Encore faut-il se mettre d’accord sur ce qui est essentiel... Nous parlons de cultiver notre jardin intérieur : est-il jardin ou terrain vague plein d’ordures ? Jardin ou terre exsangue et saturée de pollution ? Jardin ou zone commerciale ? Jardin ou bunker ?

     

     

     

    Que formulons-nous dans nos intériorités ? Quelles pensées, quelles intentions laissons-nous se densifier en nous jusqu’à ce qu’elles se matérialisent et agissent à l’extérieur ? Abracadabra ! La magie est un art du quotidien ordinaire, c’est faire bien attention à ce à quoi nous donnons formula, c’est-à-dire « forme », en latin.

     

     

     

    La poésie est une façon de formuler le monde, qui nous imprègne, nous traverse, nous façonne et nous ensemence de l’intérieur. Un art du quotidien ordinaire.   

     

    CGC

     

     

     

     

     

     

     

    (…) le chaos du monde n’est que la projection du chaos régnant dans chaque individu.

     

    Jiddu Krishnamurti in L’origine de la pensée

     

     

     

     

    En savoir plus :   http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com/archive/2023/...

     

     

     


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    l'oeil & la plume...  à l'instant fulgurant

    texte de Annelyse Simao                                                                ill. jlmi  2004

     

     

    A l’instant fulgurant du jouir  se quitter sans songer
    à nos corps Nous parcourir  Revenir à l’étreinte au jet
    dans la suite la question du oui accompagne en continu

    A-t-elle un sens seulement pour elle
    dans la bouche conquise  où l’obsède
    cette pulpe ouverte sans que puisse jamais lui parvenir
    de certitude complète

    Il plonge en moi couchée Suis-je sous lui  au-dessus
    Lequel attire quel conquiert
    Qui des deux prend  qui des deux cède
    sinon l’une après l’autre
             sa lèvre et la mienne

    *

    Avant que son sperme ne commence à glisser  où m’ouvrir
    et m’investir je t’ai hissé d’avance du néant
    T’égrène par syllabes en prénoms  te cherche une danse
    forme ébauchée de ce qui vient

    Sens ce toucher d’un manque  il me court sous la peau
    Sors du rêve de plénitude  creusé par ton fardeau
    Vide au ventre Lancé dans mon corps par des songes
    sous leurs figures absentes je plonge
    où te pétrir une vie  risque un élan et la mort
    entre auparavant et désormais

    Dans un visage sonore pressenti distinct
    nous t’aurons choisi(e)  Jailli de notre ensemble
    grâce au geste tant de fois recueilli dedans nos voix
             mon cœur se déchirera ton appel

     

    Extraits de Dans un corps éloigné de mémoire, in Qu’il m’en reste partout, La Dragonne, 2005

     

     


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    l'oeil & la plume... et dans le ventre cette braise

    texte de murièle modély                                                                 ill. jlmi 2020

     

     

    et dans le ventre cette braise qui n'a plus rien d'ardente

    trop de cendres, les jours ont consumé

    ont laissé leur suie grasse jusqu'à l'anus

    une bavure que je regarde droit
    dans les yeux

    dans les gogues

    "vas-y, baisse, remonte ta culotte

    vas-y, respire, halète"

    dit l'angoisse, ce poids mort qui pèse

    alors je mets du rouge sur mes lèvres

    du noir sur mes yeux

    et je souris à des inconnus

    surtout les tristes
    les seuls dans les bus

    qui n'ont même pas un téléphone pour un peu de lumière bleue

    je m'assois face à ceux qui n'ont rien

    dans les mains

    dans les yeux

    et j'espère que ma mâchoire sera assez grande pour deux

    pour moi
    pour eux

    je me dis qu'il doit y avoir de la beauté

    sous nos odeurs de merde

    sous nos petites suées

    sous nos petites pensées

    dans nos petites vies

    il y a de la beauté 
    quelque part qui apaise

    en attendant je mets du rouge, du noir, j'avale
    pourvu qu'à l'intérieur mon charbon ne cesse de pulser

     

     


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  • l'oeil & la plume... caddy

    texte de isabelle damotte                                                                          ill. X

     


    Le père travaillait
    sur le parking
    alignait
    poussait les caddys
    à l’abandon
    c’était avant
    le coup des jetons

    La mère
    avant
    gouvernante dans un grand hôtel
    avant les enfants le mariage
    avant d’avoir ce qu’elle avait voulu
    avait croisé Gary Grant
    « J’ai perdu la photo. »

    La mère
    mi-temps à Chambourcy
    rapportait le jeudi à midi
    les yaourts
    périmés
    Pour la première fois
    neige et fruits mélangés
    la tête nous tournait
    à force de souffler
    dans les moulins à vent

    La mère
    avec l’argent des caddys
    et des rayons
    le père devenu chef des rayons
    la mère
    avait acheté un costume
    que ça se voit
    et un après-midi
    pour nous
    des chaussures hush puppies
    on partait à l’école
    avec des chiens aux pieds
    maman très fière de son affaire

    Le père
    le jour des deux mille francs
    a découpé le gigot
    pour fêter ça
    la grosse Nadia
    à l’école
    s’enflait comme un boeuf
    avec sa phrase majuscule point à la ligne
    Mon père gagne 5000 francs par mois.
    L’autre gamine
    avec le geste
    mon manteau
    il a couté la peau des fesses

    Le père à la fin
    faisait les marchés
    juste pour la voix haute
    le rire pas caché sous la cape
    ça valait bien la peine
    de charger la voiture

    La mère
    quitte à manquer de tout
    avait manqué de temps
    elle avait prévenu
    Vous verrez
    il sera trop tard
    quand vous irez poser des fleurs
    sur ma tombe

    On n’y va pas souvent
    sur la tombe
    on regarde les films
    de Gary Grant
    On pense au père
    on vérifie qu’on a bien
    dans la poche
    son jeton de caddy

     

    Paru dans le numéro 53 de la revue Bacchanales /TRAVAIL   nov2015

     

     

     


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