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    Texte de bruno toméra                        Gilles Barbier ‘’L’Ivrogne’’   photo jlmi 2006 

     

     

     

    Terre, cette tête de larmes bleues

    qui chuchotent ses plaintes.

    Ces corps recroquevillés du petit matin délavés par les brumes glacées

    et qui rassemblent dans des rêves ankylosés empêtrés de non sens les quignons rassis émiettés dans le café refroidi de l’existence.

    On devait être des millions à cette heure à se perdre dans le paradis conformiste

    à s’inventer une vie déjà bien frelatée à coups de vagues projets trafiqués

    par les gueules de bois et quelques sauteries fantasmées.  

    Trimballer son corps entre deux ivresses et deux lysanxia

    entre le chant des mitrailleuses et le chant du cygne

    entre les barbouzes médiatiques et leurs sentences libérales.

    La nécessaire maquerelle Misère fardée de la bonne conscience de la dignité,

    les gagne-pains se vident, il y a que dalle sur l’étal des boutiques du prêt à penser,

    les perroquets savants adjurent d’une adaptation à la survie dans une allégorie du néant, avec dignité.

    J’ai balancé la radio par la fenêtre

    j’avais pris du bide dans les pantagruéliques relais de la frustration,

    c’était plus moi dans le miroir, c’était rien

    Rien qu’un mp3 enrhumé d’un adagio de Barber

    Rien que le temps passant et plus l’envie de le retenir

    Rien que l’image floue d’une perception fossilisée

    Rien que cette terrible supposition que le tour du cauchemar n’est qu’entamé

    et qu’il n’y aurait jamais d’arrivée

    Rien que soi en somme.

    Il restait pourtant de belles choses à accomplir ( sic )

    Se cramer les doigts sur un bout de cigarette

    Essuyer le pipi du chien

    Sourire benoitement du fébrile tremblement des jonquilles

    Décompter les points retraite

    Mater le tapin des étoiles

    Déshabiller jusqu’à l’os ce charmant conte que l’on nomme la vie.

     

     


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    texte & toile de jlmi  2004

     

    Le rêve en attente jusqu’à l’ivresse  pour vivre sa vie de rêve 

    La voie du phénomène vibratoire d’une rue

    L’instant unique de l’évaporation de la tête dans l’oreiller

    Le deuxième étage du monde comme verroterie du salut

    Le suicide comme un raccourci vers l’action révoltée

    Les visages noyés de l’intérieur par la fonte des glaces

    La solitude juste à portée de la main en train de se tendre

    L’odeur de l’interdit comme partie intégrante de l’existence

    La vague accepte dans son déferlement la beauté qu’elle ne voit pas

    L’enfant de l’orage pas étonné de s’entendre grandir

    Les chiens endormis au coin de ma cervelle

    La chute vertigineuse dans le tourbillon du Temps

    Le délire dément du don non démenti du ‘’Dharma’’ de JK

    La profondeur solide de la pierre musicale d’un escalier liquide

    La question : est-ce que les chauve-souris… dans les cheveux…

    La réponse : si on tourne en rond, on n’arrive jamais

    Le cauchemar de tableau noir d’une ardoise dans un bar

    L’air cru de froid malgré un feu de pierres noires à l’odeur assoiffante

    La question : dis moi ce que tu dois…

    La réponse : mon âme contre un peu de liquide

    Les spectres en suspens, demande subliminale de laideur

    La réponse : Parfois oui. Souvent non !

    La question : tout périra y compris les périls…

    L’escalier liquide au rivage inégal où l’humain apocalypse

    Les échelles volantes pour ambuler dans les heures mortes

    La soudaine pulsation désordonnée de l’artère humérale ou du nerf médian – va savoir - à l’antérieur du coude gauche

    Le destin fossoyeur de l’intemporalité du temps

    Les équinoxes équivoques des soleils de silence

    La réponse : en des errances de déshérences urbaines

    La question : l’ailleurs …

    Le refuge en terre masaï d’Edgar Allan Poë

    Le germe de perversion des nuages constructeurs de bateaux

    L’empathie d’une grande goulée de blanc gommé

    La réponse : du semblable au semblable

    La question : d’aujourd’hui à demain…

     

     extrait de Conversation autour d'un bol de nouilles   inédit

     

     


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    l'oeil & la plume...  sur le balcon

    texte de Paul Verlaine               ill. jlmi sur "Room in Rome" de Julio Medem

     

    Toutes deux regardaient s’enfuir les hirondelles :
    L’une pâle aux cheveux de jais, et l’autre blonde
    Et rose, et leurs peignoirs légers de vieille blonde
    Vaguement serpentaient, nuages, autour d’elles.

    Et toutes deux, avec des langueurs d’asphodèles,
    Tandis qu’au ciel montait la lune molle et ronde,
    Savouraient à longs traits l’émotion profonde
    Du soir et le bonheur triste des coeurs fidèles,

    Telles, leurs bras pressant, moites, leurs tailles souples,
    Couple étrange qui prend pitié des autres couples,
    Telles, sur le balcon, rêvaient les jeunes femmes.

    Derrière elles, au fond du retrait riche et sombre,
    Emphatique comme un trône de mélodrames
    Et plein d’odeurs, le Lit, défait, s’ouvrait dans l’ombre.

     


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  • l'oeil & la plume...  la terre fait taire tous les silences

    texte & ill. jlmi

     

     

    Au seul Bouddhiste Taraviste Libertaire  

    que je connaisse en ce monde

    pour le moins déglingué

    Alléluia !

     

     

    Titubant dans l'escalier liquide

    des rails luisants du tram T3,

    un bel ivrogne nommé Désir

    voyage aux portes de la nuit.

    Oiseau nocturne à bec de bois

    il brûle de la grande soif amère

    et mord la pluie,

    une pluie lasse de pleuvoir.

    Sa solitude hirsute transpire

    en mille éclats de visages fatigués

    dans le miroir de l’incognito.

    Toujours son tour de s’affaler sur le pavé

    au grès gris graisseux de ce caniveau,

    dur enfer bitumeux de la biture,

    qui suinte les sanies mécaniques

    des bagnoles qui filent sur l’enfer d’asphalte des Maréchaux

    aux heures pâles de brouillard.

    Le bois de Vincennes est à deux pas…

    Toujours son tour de joncher le sol de ses songes épilepthyliques

    d’anarcho-alchimiste des mots-fêlures reclus au cœur de l’âme.

    Ces mots des simples de la quotidienne servitude

    qui font bailler des corneilles aux intellos

    dont les yeux ne savent plus que scruter leurs ombilics précieux

    et donnent bonne conscience aux politicos de tous poils,

    ces baveux dont les yeux ne savent plus que berner d’échéances en déchéances.

    Ces tous paumés dans le labyrinthe de leurs mots vide de vie, ces mots menteurs

    porteurs de maladies étranges.

    Un peu plus loin, sur le boulevard Soult

    sous le cône verdâtre d’un réverbère

    une ombre rousse de la nuit

    bien calée contre sa camionnette aménagée

    serre les pans de son manteau miteux

    sur les pauvres reliefs de sa nudité crue.

    Elle a vu Désir tomber fin bourré. Raide.

    Elle hésite. La peur des coups.

    Elle en a son compte faut dire…

    Lui elle le connaît, enfin elle pense,

    - sa barbe poivre et sel,

    ses lunettes à monture d’écaille rafistolées avec du sparadrap -

    pas de doute !

    mais qu’est-ce qu’il peut bien foutre ici ?  

    Il lui semble qu’elle l’a déjà vu dans un bistrot du Marais, son quartier,

    Là où elle rejoint parfois ses copines qui tapinent dans les petits coins d’ombre

    entre Bastille et Sébasto.

    Mais oui, c’est ça, à  « la Goule en pente », il a même sa table attitrée.

    Faut dire que Marinette la patronne elle l’a à la bonne le Désir.

    Paraît qu’il reste là des heures à mendier sa chopine en récitant des histoires.

    Des poèmes qu’il dit, lui, pas des histoires.

    Des trucs qu’il a gribouillé avec un vieux bic tout mâchuré

    sur des bouts de papier sales

    - cueillis au hasard rue de la Verrerie, autour du bhv,

    ( ben oui, il habite au Grand Hôtel de la rue des Mauvais Garçons,

    ça s’invente pas ça. Enfin la cambuse elle est un brin décrépite faut dire…

    elle a que le nom de ronflant )

    j’en étais où ? je digresse comme il dirait…

    ah oui, ses papiers sales –

    ils les ramassent

    quand les poubelles du magasin débordent avant le passage des boueux –

    Pour les lire ses papelards, il les tire délicatement de ses poches de veste ou de futal

    et ne commence qu’après les avoir repassés, caressés plutôt, avec soin

    du plat de la main

    sur la table toute parée des auréoles des verres déjà passés.

    Belles ses histoires au Désir…faut dire

    Elles disent leurs pauvres vies profanées d’exclus,

    d’interdits du circuit touristique des alouettes

    ensuquées des mensonges

    du libéralisme.

    Toutes ces tricheries farouches de la multitude.

    Même quand il en a déjà un coup dans le nez,

    il les dit bien ses poèmes. Ça oui !

    A donner la chair de poule,

    tous les poils des bras en train de bander ferme.

    Ça met du baume au cœur.

    Son cœur au Désir,

    il doit être énorme,

    avec tout ce qu’il essaie de donner

    avec ce peu qui lui reste :

    ses mots…

    La Rousse se décide d’un coup,

    sa nuit est foutue de toute façon,

    une vraie nuit de chien,

    alors elle va vers le corps recroquevillé

    se penche,

    le secoue,

    lui parle presque à l’oreille,

    ramasse ses lunettes mal en point

    lui tire un bras pour le forcer à se lever…

    il éructe des phrases incompréhensibles

    puis il bouge,

    gesticule,

    se redresse,

    il la voit, son œil s’éclaire,

    il lui sourit

    - un sourire ébréché sous un coquard

    déjà viré aubergine et cerne jaune -

    un sourire qui vaut mille mercis.

    Il y a beaucoup de quelques parts

    alors les voilà partis titubants tous les deux

    vers la camionnette,

    mais déjà bien au-delà,

    vers un espoir d’ailleurs que la rue,

    mémoires jetées aux chiens.

    Un ailleurs sans crachin jusqu’aux laudes profanes

    où viveurs de vies

    ils trouveront à partager

    ce qui leur reste,

    le temps intérieur

    ce temps qui ignore ses limites.

    Il en fera peut-être un poème.

    Va savoir !

    La terre fait taire tous les silences

     

     

     extrait des Preuves incertaines   ed Nouveaux Délits 2020

     


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  • l'oeil & la plume... on a retrouvé Jésus

    texte & photos de cathy garcia

     

    Un christ jeté face contre terre dans les broussailles.
    Un grand christ blanc aux mains trouées, aux pieds cloués.
    Un grand christ blanc taché de rouge, décroché,
    Jeté face contre terre près d’un muret en pierre.
    Trouvé dans les broussailles dans un coin perdu du causse,
    la veille de Pâques. Véridique !
    Alors nous l’avons retourné, nettoyé un peu
    et avons déposé dans les trous de ses paumes,
    quelques fleurs jaunes de coucou.

     

    cg in Purgatoire du Quotidien, à tire d'ailes 2014


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