•  

     


    votre commentaire
  • l'oeil & la plume... si tu viens

    texte de lucie delarue-mardus                                                       ill. jlmi 2019*

     

     

     

    Si tu viens, je prendrai tes lèvres dès la porte,

    Nous irons sans parler dans l'ombre et les coussins,

    Je t'y ferai tomber, longue comme une morte,

    Et, passionnément, je chercherai tes seins.

     

    A travers ton bouquet de corsage, ma bouche

    Prendra leur pointe nue et rose entre deux fleurs,

    Et t'écoutant gémir du baiser qui les touche,

    Je te désirerai, jusqu'aux pleurs, jusqu'aux pleurs!

     

    -Or, les lèvres au sein, je veux que ma main droite

    Fasse vibrer ton corps -instrument sans défaut -

    Que tout l'art de l'Amour inspiré de Sapho

    Exalte cette chair sensible intime et moite.

     

    Mais quand le difficile et terrible plaisir

    Te cambrera, livrée, éperdûment ouverte,

    Puissé-je retenir l'élan fou du désir

    Qui crispera mes doigts contre col inerte!

     

    in Nos amours secrètes   (1902-1905)

    * base photos de ldm de 1905 coll. félix potin n°3 + the kiss de clarence h. white de 1904

     


    votre commentaire
  • l'oeil & la plume...  fumées

    texte murièle modély                                                                     ill.  jlmi  2021

     

     

    Si on considère le taux de pollution de mon environnement urbain, ma localisation sur un des carrefours les plus fréquentés de la ville, ma génétique, mes problèmes circulatoires, mes diverses allergies et les pics de stress auxquels j'expose régulièrement mon organisme, je peux objectivement considérer que malgré ma petite quarantaine, il ne me reste qu'une petite poignée d'années à vivre.

    Sans compter les kilos de goudron avalés depuis les vingt dernières années...
    J'aurai aussi pu commencer comme le petit moustachu par une formule du genre : "Longtemps j'ai crapoté mes clopes... ".
    Le temps est parti en fumée dans mes poumons ou ailleurs, il n'a laissé aucune saveur.
    Je n'ai pas envie de me souvenir.

    Je suis une vieille à la peau fripée, qui boit des bières éventées dans un café miteux.
    Je m'installe toujours à la même table graisseuse, uniquement concentrée sur mes mains ridées qui portent avec constance le verre à ma bouche. Ce qui se passe dehors, ce qui se passe avant, ce qui se passe après, est sans intérêt. Je porte le verre humide à mes lèvres, et laisse l'amertume dévaler une gorge prochainement ravagée par une excroissance, un kyste, un lymphome quelconque.

    Si la nécrose n'attaque pas les tissus corporels gorgés de tabac, je peux compter sur la fumée ambiante. Dans le café, tous fument, des boyards, des brunes, des blondes. Tous crachent leurs miasmes sur les meubles alentours et mon corps alangui.

    Et puis le halo dans lequel je baigne est rempli de petits cadavres. Je n'ai pas toujours été seule.
    Je reconnais vaguement dans les formes ectoplasmiques qui flottent dans l'air, des moignons d'enfants, des sexes racornis, des cheveux filasses, des ventres tendus, des membres tuméfiés.
    Cela fait des volutes. Elles enserrent ma tête, s'emmêlent autour de mon cou, s'infiltrent dans mes narines. Pour lutter contre cette sensation d'oppression, pour libérer mes voies respiratoires, je bois.

    Et je rote, je pisse, je racle, je renifle, je biaise primairement contre l'anéantissement. Je confis lentement dans des fumées mortuaires.

     


    1 commentaire
  • l'oeil & la plume... les mythes & les athées

    texte & photo  jim morrison

     

     

     

    Les mythes & les athées sont doublement divins
    & mourants
    Nous vivons, nous mourons
    & la mort n’arrête rien
    Nous poursuivons notre voyage dans le
    Cauchemar

     

    in une prière américaine

     


    votre commentaire
  • l'oeil & la plume...  Cher ami,

    George Sand par Alfred de Musset, 1833

     

    Cher ami,

    Je suis toute émue de vous dire que j'ai
    bien compris l'autre jour que vous aviez
    toujours une envie folle de me faire
    danser. Je garde le souvenir de votre
    baiser et je voudrais bien que ce soit
    une preuve que je puisse être aimée
    par vous. Je suis prête à montrer mon
    affection toute désintéressée et sans cal-
    cul, et si vous voulez me voir ainsi
    vous dévoiler, sans artifice, mon âme
    toute nue, daignez me faire visite,
    nous causerons et en amis franchement
    je vous prouverai que je suis la femme
    sincère, capable de vous offrir l'affection
    la plus profonde, comme la plus étroite
    amitié, en un mot : la meilleure épouse
    dont vous puissiez rêver. Puisque votre
    âme est libre, pensez que l'abandon où je
    vis est bien long, bien dur et souvent bien
    insupportable. Mon chagrin est trop
    gros. Accourez bien vite et venez me le
    faire oublier. À vous je veux me sou-
    mettre entièrement.

    Votre poupée


    (Correspondance de George Sand à Alfred de Musset.
    Conseil de lecture : Lire une ligne sur deux)

     

     


    votre commentaire