• l'oeil & la plume...

    texte de werner lambersy                                                             collage  jlmi

     
     

     

    J’écoute mourir

    et remourir

    la mer

     

    mais la mer est

    toujours là

     

    qui veut mourir

    en épousant

    l’horizon

     

    Je vois paraître

    et reparaître

    l’étoile

     

    mais le ciel est

    toujours là

    qui veut

     

    disparaître et se

    jeter dans le

    vide

     

    Je sens passer et

    repasser les

    jours

     

    et rien jamais ne

    me lasse

     

    de cette mort

    qui ne peut pas

     


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  • l'oeil & la plume... j'oublie de la regarder

    texte de gabeba baderoon                                                     photocollage jlmi

     

    La photo de ma mère à son bureau des années 50

    est dans ma bourse depuis vingt ans,

    le papier brunâtre se décolore,

    le bord festonné s’est recourbé puis redressé.

     

    Le col de sa robe est discrètement croisé.

    On pourrait croire qu’on l’appelle au loin,

    par l’angle que fait son cou.

     

    Elle était la première de la famille à prendre

    le bus de Claremont

    qui monte la colline pour se rendre à l’université.

     

    A un moment pendant les cours à l’école de médecine,

    les étudiants noirs devaient ranger leurs affaires, se lever 

    et quitter l’amphithéâtre en longeant les rangées de pupitres.

     

    Derrière la porte close, lors d’une autopsie,

    les étudiants noirs n’étaient pas censés voir

    la peau blanche mise à nue et découpée.

     

    Sous le couteau, sous la peau,

    mystère de la ressemblance

     

    dans un monde qui définissait comment noir et blanc

    pouvaient se regarder l’un l’autre, se toucher,

    ma mère regarde en arrière avec un aplomb intact.

     

    Chaque fois que j’ouvre ma bourse,

    elle est là, si familière que j’en oublie

    de la regarder.

     

     

    courtesy biennale internationale des poètes du val-de-marne 


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  • texte & lecture de cathy garcia

     


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  • l'oeil & la plume... ils se meurent nos oiseaux

    texte de glenmor                                                                            photo X

     

    Savez-vous les temps
    Où labourant les mers
    Nos frêles caravelles
    Croisaient le Terre-Neuvas
    Où le marchand phénicien
    En légère nacelle
    Coulait le bateau génois
    Quand ils chantaient nos oiseaux

    Savez-vous les temps
    Où l'or avait goût d'écume
    Où la pierre était de lune
    Et le navire se voulait là-bas
    Qui nous dira s'il fallut l'orage
    S'il fallut la guerre
    Pour qu'il n'en revienne pas
    Puisqu'ils chantaient nos oiseaux

    Savez-vous les temps
    Où l'empire d'argent
    Relevait du courage
    Et le marchand était soldat
    Qui bâtissait au fil des ans
    Etait maître d'abordage
    Filait le rocher et défiait le vent
    Lorsque chantaient nos oiseaux

    Ils ont fui les temps
    Où l'apôtre était marin
    Où la vierge gardait la voile
    Et la galère du conquérant
    Ils ont fui les temps
    Où l'Ile avait nom de bataille
    Qu'importe si le flux
    Poussait la canaille
    A violer les filles du Levant
    Car ils chantaient nos oiseaux

    Ils sont venus les temps
    Où l'or germé du sable
    Veut baptiser l'océan
    Et pour que juste soit la fable
    Le salaud se fait marchand
    Ils sont venus les temps
    Où l'argent du connétable
    Achète la mer à l'encan
    Et pour qu'injuste soit la fable
    La noire marée brise l'envol du goéland
    Car ils se meurent nos oiseaux

     


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  • l'oeil & la plume...

    texte de annelyse simao                                                             ill. brion gysin

     

     

    De quel droit demander au-delà de tes noms date et
    lieu de naissance de quoi vous survivez sans emploi
    ni salaire quel sens vous accordez à cet abri de béton
    aux murs et portes sales

    Quelle joie peut encore germer dans les mots qu’on
    assemble si ceux qui nous appellent sont empêchés
    par tous ceux que l’on doit

    Quel plaisir trouver dans des phrases quand les mots
    défaillent à bousculer le monde

    Si toujours aux mêmes gens la parole manque
    sans avenir sans travail sans argent ni santé
    sans famille ni espoir autre qu’envie d’objets réels
    à posséder consommés

     

    Extraits de Nous chercher par les gestes,

    in Que je dise de vous les blessures, La Dragonne, 2010

     


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